mardi 9 juin 2009

L'anti-héro...


Je termine ma transformation par une casquette rouge sous laquelle j'aspire à ne pas etre reconnu, un peu comme une pute fait avec son rouge à lèvres.
Juste avant j'avais mit mon pantalon beige tout taché, un grand T-shirt orangé, qui serait ceintré si je fréquentais les gyms et mangerais plus, le tout recouvert d'une veste de jeans. Le rouge, l' orange et le beige s'harmonisent bien au bleu de mes chaussettes.

Je prends un grand respire et je sors de chez moi. Je ne suis pas dans mon secteur alors je n'adresse la parole à personne, je ne suis pas encore dans mon personnage non plus, bien que j'en porte le costume, le jouer ici m'humilierait. Je ne suis que dans le couloir qui mène à la scène, la représentation n'est pas encore commencée.

La transformation se passe au milieu du boulevard Saint-Denis, une fois du coté ouest, je deviens cet anti-héro qui interpelle tout ceux qu'il croise.
Là, tout est en place, le costume, le décor et le texte que j'ai amélioré dernièrement. J'y ai ajouté un bonjour et j'ai balancé le excusez-moi. C'est à force d'étudier la réaction de mon public, plusieurs personnes me répondaient par un bonjour. Je ne comprenais pas au début, ca me semblait une drole de réponse mais ils voulaient me signifier que mon texte serait plus intéressant s'il commencait ainsi.

Alors je mets le pied sur le trottoir ouest, un jeune homme va croiser mon chemin bientot, il est à deux metres de moi, c'est là que je commence ma représentation pour ne pas le surprendre et lui laisser temps de voir le personnage avec qui il fera ou non affaire.
- Bonjour monsieur, vous auriez un peu de monnaie svp?
- What? (comment ca what on est sur la Plateau osti me dise-je sous mon déguisement)
- Vous auriez de la monnaie?
- Sorry I don't speak french.
- Ok, au revoir. Je ne tente meme plus avec les anglais, ils disent toujours non.

Je marche jusqu'à mon coin, qui n'en est pas un, c'est en plein milieu de deux coins de rue, devant une SAQ. Là, je ne demande rien à personne, nous sommes au deuxième acte, la mise en scène est bien faite, le costume convient toujours, mon role est bien campé, à eux de définir le leur maintenant.
Je ne fais que saluer les gens qui entre, bonjour monsieur, bonjour madame ou bonjour monsieur- dame. Je le fais en douceur, contrairement au théatre traditionnel, là, je ne veux pas que ma voix porte trop,. Certains choisissent le role de l'irrité par ma présence, alors je ne veux pas trop les importuner.

À leur sortie, je les regarde, au théatre il parait que l'écoute de l'autre comédien importe beaucoup, alors j'analyse ce que je vois du jeu de cet autre, parfois je me tais et parfois je dis Bonne fin de journée.

Certains s'arretent, la plupart non. Je tente de ne pas trop les importuner par mon infortune. Je suis comme un danseur qui veille à ne pas trop piler sur les pieds de son partenaire ou encore, qui ne se fait pas trop insistant lorsque l'autre refuse de danser.
Certains dansent avec moi, d'autres pas, et certains autres, vraiment pas.

Un billet quelconque pour quelqu'un

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4 commentaires:

Anonyme a dit…

Je salue ton courage, car j'ai bien l'impression que c'est ce que ça a prit pour dire. À moins que je ne me trompe - tu sais, le contre-transfert est si facile ;)

Un jour, au coin d'une SAQ de Montréal, j'ai rencontré un quêteux. Nous avons jasé un peu - il était sympathique. Je lui avais donné mon adresse de blogue. Je ne l'ai jamais revu : ce n'est pas mon quartier. Si tu le vois, salue-le de ma part.

Michel a dit…

@ Morgane...
Lolll pour l'allusion au contre-transfert. Lorsqu'on prends soin de vérifier pour l'ajuster à la réalité émotive de l'autre, on se trompe moins. Je dirais humilité et honte.
Je dirais qu'il est dfficile de le dire, tout aussi difficile que de le faire.

Anonyme a dit…

Blague à part, ce que tu as écrit sur l'empathie m'a beaucoup intéressée - parce que cela fait partie d'un de mes problèmes.
-Distinction entre sympathie et empathie (non pas théorique, mais dans la vraie vie) - ce qui m'oblige à prendre des périodes de recul de la vie sociale.
-Éviter aussi les certitudes : le contre-transfert

Parfois, on a l'impression d'écrire dans le vide, mais c'est ça aussi l'acte d'écrire. On ne sais jamais comment est reçu le message chez l'autre.

Michel a dit…

@ Morgane...
Tant mieux si mes trucs sur l'empathie ont pu intéressé un lecteur. Et tu rajoutes ...non pas théorique...alors mon objectif est atteint.
Comme je disais là théorie devient intéressante lorsqu'elle s'applique ou s'ancre, sinon, bof...
On accorde beaucoup d'importance soit à la tete soit au coeur et on néglige l'importance du lien entre les deux. Il est là l'ancrage, sinon on à l'air désincarné ou d'une poule sans tete.