dimanche 27 juin 2010

Redevable oui, mais de quoi?....

Dans un de mes billets, un répondante écrivait qu'elle se sentait redevable et qu'elle répondait donc aux questions des gens à qui elle quêtait.

Redevable, je n'y avais pas pensé en ces termes. Sur le coup j'aurais pu répondre c'est idiot comme point de vue, un reçu pour don de charité tant qu'à faire?.
Mais j'y ai pensé un peu plus.
Et j'en arrive à ceci...

Redevable à qui et de quoi?

Personnellement dans mes quêtes mon mot d'ordre est respect.
J'ai la chance de pas quêter dans des états ou je suis en manque pressant d'alcool ou de drogue. Alors cet empressement d'obtenir de l'argent pour taire des symptômes dont tu as l'impression qu'ils te tueront n'est pas mon cas. Je peux être en manque de nicotine mais ça, ça se tolère assez bien.

Alors je me sens redevable aux gens que j'aborde, pour leur demander quelque chose, de leur demander avec respect, politesse et sans m'imposer à eux, ce qui pourrait les intimider (bien que l'intimidation est visiblement payante, ce n'est pas mon style)

Mais je ne me sens pas juste redevable à ceux à qui j'ai demandé, à ceux aussi qui ne veulent pas être importunés par un quèteux , généralement je les reconnais après un passage et après deux, je sais si ils préfèrent que je les ignore. Ce que je m'empresse de faire.

Redevable aussi de témoigner du respect pour les commerçants de la rue ou je quête, c'est dans mon intérêt. Respect envers les autres quèteux, ça aussi c'est dans mon intérêt, ainsi qu'envers les policiers.

Mais redevable de parler de mon intimité, non, jamais je n'ai senti qu'une ou deux piastres pouvait acheter cela.

Bien sur avec les habitués, on fini par allez plus loin mais avec parcimonie pour ma part.
D'ailleurs pour la plupart, j'en sais plus sur eux, qu'eux sur moi. Et la plupart des habitués donnent sans demander, ils ne veulent pas plus que cette courte transaction.

9 commentaires:

ramblings a dit…

La plupart des gens préfèrent faire semblant que t'es même pas là... alors si une femme s'arrêtait pour fouiller dans le fonds de sa sacoche, qu'elle prenait le temps d'me regarder dans les yeux, et de m'demander quelque chose, moi, j'me devais de lui répondre.

J'dis pas que tu dois quoi que ce soit à qui que ce soit, et d'ailleurs, peut-être qu'elle me posait la question par politesse, et qu'elle voulait pas vraiment savoir, qu'elle s'en crissait solidement, mais des merci, et des sourires, aussi sincères qu'ils étaient... j'voulais les remercier plusse, j'voulais expliquer. Mais ça c'est moi, et toi, ben t'es toi.

Et c'est sur que hors contexte, j'veux dire, le gars a demandé ton nom, mais on sait pas sur quel ton, ni dans quel intérêt, etc.

Mais j'comprends aussi ton point de vue de vouloir au moins préserver ça: ta vie, tes trucs personnels.

Anonyme a dit…

Tu m'intrigues beaucoup toi. Et j'ai l'intuition qu'on s'est sûrement déjà vu. Pour être honnête, si tu m'as vu, j'étais de celles qui passent sans faire attention. Sans un regard. Parce que je ne suis pas du monde, parce que je ne veux pas être dérangée, parce que je ne veux pas donner. Dans mon coin on a l'habitude de se faire quêter à tous les coins de rues. Ce qui fait que nous finissons par nous endurcir et ne plus donner puisqu'il y a trop de demandes. Alors je fais semblant que ça n'existe pas, c'est moins culpabilisant. Par contre, je ne juge pas, parce que je comprends la souffrance qui peut mener là.

Michel a dit…

Ramblings,
Je te crois que tu as déjà mendié parce que tu abordes le sentiment de l'invisibilité et ça c'est une impression que l'on ressent parfois très fortement.
Il m'arrive parfois après une heure d'inexistance de demander à un piéton, excusez-moi, est-ce que vous me voyez?

Pour celles qui fouilles dans leur sacoche, je les remercie de l'effort fait en leur disant que c'est gentil.

Pour le nom, il n'y a pas de ton, ça ne les regarde pas. Bien sur que je pourrais en inventer un mais j'ai décidé de me taire au lieu d'inventer. C'est plus respectueux, pour les deux.

Bien sur que je préserve ma vie, je ne me soumettrai certainement pas dans la rue. Les passants ne sont pas mes patrons.
Je quête mais je tente de préserver les miettes de dignité qu'il peut rester.

TS
Moi ce que j'aime le mieux comme attitude c'est lorsque les gens me disent...une autre fois peut-être ou juste un signe de la tête disant non.

Marie-Eve Desjardins a dit…

Je crois que tu as à être redevable envers toi-même tout d'abord. Le reste t'appartient.

Mais à Montréal, il y a beaucoup de gens qui quête et je sais que plusieurs personnes font comme moi, c'est-à-dire qu'ils se choisissent une personne ou deux en particulier à qui donner. Si je ne faisais pas ça, je deviendrais insensible je crois. C'est peut-être ce que la personne qui t'a demandé ton nom voulait.

Personnellement, lorsque je croise quelqu'un qui quête je le regarde, je souris et je répond que "désolé, je n'ai rien". C'est souvent un mensonge, mais je me dis que c'est mieux que l'ignorance. peut-être pas en fait, ça c'est toi qui pourrait le dire.... moi ce que je sais c'est que je me sens redevable envers les gens qui quête.

En passant, je trouve ça triste que tu quittes la blogosphère parce qu'égoïstement je viens tout juste de découvrir ton blog :)... mais aussi parce que ça prend des voix comme la tienne pour forcer les autres - me forcer- à réfléchir en dehors du carcan.

Newton a dit…

Ce sont plutôt ceux qui t'ont mis à la rue qui te sont redevables. Ils paieront bien un jour...

Michel a dit…

Marie,
La personne qui m'a demandé mon nom n'avait surement pas de mauvaises intentions, c'est juste qu'il est entré dans une zone bétonnée mais je l'ai revu à plusieurs reprises et il n'en porte pas ombrage.

L'ignorance, après l'agression verbale ou physique est la pire option. En passant, ce n'est pas un mensonge de dire que tu en as pas, c'est une vérité. Je n'ai pas d'argent pour toi aujourd'hui.
Mais le non, bonne journée. Il ne sert à rien de trop expliquer, non pas aujourd'hui est idéal.

Perso, je trouve que je force trop les carcans, souvent ça produit l'effet inverse. Le dernier billet de Opération Reboot est un bon exemple d'une bonne mesure je trouve.

Michel a dit…

Newton,
c'est exagéré un peu.
Je suis responsable de mes malheurs mais disons qu'il y a dans la société des facteurs précipitant et non facilitant.
C'est l'humain ça, mais de croire que les gens paieront un jour, c'est de l'ordre d'une morale religieuse, d'une justice suprême. Ce qui n'existe pas vraiment dans les faits mais c'est réconfortant pour les dominés, dans une autre vie quoi!

Newton a dit…

Loin d'être d'une croyance religieuse ou suprême quelconque, je persiste à penser que ce qu'on fait de mal nous est remis d'une façon quelconque par la vie. Sans pour autant croire que nos malheurs sont le fruit d'actes passés. C'est réconfortant, en effet...

Newton a dit…

Loin d'être d'une croyance religieuse ou suprême quelconque, je persiste à penser que ce qu'on fait de mal nous est remis d'une façon quelconque par la vie. Sans pour autant croire que nos malheurs sont le fruit d'actes passés. C'est réconfortant, en effet...