samedi 20 décembre 2008

C'est pas moi, c'est l'autre...


- Cé une folle j'te dis. Elle m'harcèle au bureau, le patron doit lui dire de pu appeler. Elle a pas d'allure. Veux tu ben me dire à quoi j'ai pensé de faire un enfant avec elle. Elle me menace tout le temps que je verrai pu ma fille. J'suis pogné à vie.

Et mon psy de répondre:
- Qu'est ce que tu fais qui contribue à cette dynamique?
- J'ai rien à voir là-dedans, c't'une folle. Elle s'engueule avec les chauffeurs d'autobus, les voisins. Hey, elle a meme mordu le doigt d'une bibliothécaire, tsé, faut le faire, non?

Je me dis que ce psy là est dans le champ et comprends vraiment rien. Tu parles d'une question à poser. J'en reviens pas qu'il laisse sous-entendre que j'aurais un role à jouer dans cette dynamique de fou qui m'est imposée par Madame.

Je quitte son bureau en colère, frustré par son incompréhension. Il ne comprend rien à ma souffrance, ni à l'enfer dans lequel elle me plonge jour après jour. Elle me tue petit à petit et je suis seul au monde avec mes blessures qui m'ébranlent au plus profond de mon etre.

Elle, par contre, Madame, a tout ce qu'il faut comme appuies dans sa correctitude. Elle me dit souvent...
- Tout le monde dit que t'as pas d'allure.

Tout le monde calisse, je suis mal pris en maudit. L'Amérique du Nord, celle du Sud, l'Europe, l'Asie, les Afriques, l'Océanie et meme les extra-terrestres confirmeraient tous que Madame a raison.
- Qui ca tout le monde?, elle ne répond jamais. Tellement évident j'imagine qu'elle ne ressent peut-etre pas le besoin de justifier cette affirmation.

Au cours de la semaine qui a suivi, la question ridicule du psy occupait mon cerveau. Il y a un dicton qui dit It take two to tango, un truc du genre. J'ai fini par accepter de me demander comment je pouvais participer à cette escalade.
À mon grand étonnement j'ai pu identifier des choses venant de moi qui pouvaient attiser le feu.
Je ne dis pas que je suis responsable de tout, la mère de ma fille à sa personnalité (plutot explosive, la mienne implosive), mais j 'ai vu que ma facon d'interagir avec elle qui pouvait avoir pour effet de contribuer à l'escalade des tensions.
Il m'est apparu clairement que j'attaquais aussi. Rationnellement je me disais, bien non mon gars tu n'attaques pas, tu te défends, mais ca? je n'ai jamais entendu quelqu'un dire j'attaque sans raison, par simple méchanceté. Toutes les personnes que j'ai connues lorsqu'elles attaquent croient fermement qu'elles se défendent d'une agression. Comme si le monde n'était constitué que de victimes.

En poursuivant mes réflexions j'ai pris conscience que meme dans les moments ou je ne suis pas l'instigateur, ma facon de me défendre, contribue à l'escalade.
J'ai réalisé que je suis vulnérable dans la mesure ou j'arrive difficilement à m'affirmer efficacement. Sans etre, à priori, une provocation comme telle je contribue ainsi à faire en sorte que la dynamique perdure et se détériore. Décidemment je n'arrive plus à me voir comme une simple victime innocente d'un autre, cruel. Font chier les psy.
Suite à ces réflexions, je ne pouvais plus envisager l'affaire sous le seul angle de c'est pas moi c'est elle.

Il y avait aussi beaucoup de moi dans cet enfer qu'était ma vie de parent.


Après 17 ans, je pourrais dire objectivement que la mère de ma fille a fait un bout d'introspection sur l'affaire, bien que je reste pour elle celui qui n'a pas d'allure, celui qui a légué les traits de caractères qu'elle n'aime pas chez sa fille. Mais j'aurais eu un père comme le sien et je ferais peut etre pareil. En tout cas, je peux vivre avec ces reproches là.

Je n'embarque plus beaucoup, parfois ca désamorce, parfois pas, mais ca ne me blesse plus autant, j'en suis moins affecté. Ce n'est pas de l'indifférence c'est plutot que j'arrive à m'affirmer un peu mieux et j'arrive à mieux me protéger. Je pourrais dire que l'enfer est terminé pour moi depuis 4-5 ans environ. Quelques brulures aux mollets parfois mais en surface seulement, rien à voir avec ces brulures au troisième degré sur 80% de la surface de mon corps.

C'est un long processus, très long. Lorsqu'on baigne dedans, on a parfois l'impression que l'on en sortira pas vivant. L'espoir disparait laissant la place au désespoir.
Dans mon cas la douleur fut particulièrement forte car j'avais connu l'enfer dans ma famille d'origine alors j'avais fondé beaucoup d'espoir pour ma famille à moi. L'impact de l'échec fut dévastateur. Mais avec le temps, avec le temps tout...

Je n'ai qu'un conseil pour un parent qui a un enfant avec un ex...
Ne laissez pas la colère vous dicter l'utilisation des mots Monsieur ou Madame, par respect pour l'enfant maintenez père et mère.
Ca peut paraitre un détail, mais l'autre reste le parent de l'enfant, une partie importante de ce qui le constitue, en niant cette partie, c'est inévitablement une partie de l'enfant que l'on nie en meme temps. Je ne suis pas fort sur les conseils mais celui là, j'en suis sur, alors je l'ose.

********

Un de mes défauts, je sais comment provoquer l'autre, ben oui, la confrontation est l'une de mes forces. Ma fille s'essaye avec moi mais je vois venir l'affaire. Je ne sais si j'ai le gout de lui enseigner cet Art par contre?
J'hésite parce qu'au bout de la provocation je finis souvent écrasé parce que je m'attaque souvent aux monstres. Je tente plutot de lui enseigner le judo , ca me semble plus productif. Je ferai un billet là-dessus un jour lorsque je parlerai de ma mère. Ma colère, ma rage et ma peine viennent en partie de là.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Tu permets que je te répondes ici? Puisque je me sens directement concernée :)

Je sais que tu as raison, sur l'entièreté de ton message. C'est pourquoi jamais je ne parle en mal de leur père devant les enfants, même pas une petite phrase, rien.

Et je tente, le plus possible, de laisser nos échanges sur un terrain le plus neutre possible. Mais aie, là, je suis pas parfaite du tout. Quand je vis des choses difficiles, comme maintenant avant les cancers de ma famille, disons que j'ai les émotions à fleur de peau. Mais j'y travaille, essayant de ne pas envoyer de courriel "on the spot", car cela ne fait qu'envénimer la situation.

... mais il y a des limites à être la conne de service. Parce que je suis allée en voyage, le père de mes enfants a décidé de se payer lui-même sur les deux premiers versements du patrimoine familial de janvier. Conclusion : je n'aurai rien pour faire vivre mes enfants et moi-même d'ici à la première paie de l'UQAM à titre de chargée de cours, le 25 janvier. Rien.

Je pense que j'ai le droit d'exprimer ici toute la rage que j'éprouve à son endroit. Rage que je tente de ravaler quand j'échange avec lui, pour les enfants. Que pour les enfants. Je fais des efforts pour éviter l'escalade.

J'espère que tu comprends mieux ma position ?

Michel a dit…

Morgane ce n'était en rien un jugement sur ta réalité mais alors là vraiment pas.
Ton billet m'a inspiré un sujet, deux plutot.

Pis les émotions qui s'expriment librement sur un blog, c'est parfait, y a certainement pas de rectitude politique là. Si c'est l'effet que ca produit, je m'en excuse.

Ton billet m'a inspiré pour le truc d'ex qui sont parent mais aussi sur l'expression de la rage.

Je pensais déjà écrire un billet sur la colère qui est proche cousin.

La colère me tue et m'enrage faudrait bien que j'arrive à écrire, mais je suis tellement en dessous que je n'y arrive pas pour le moment. Mais ca me brule d'y mettre des mots autres que celui ulcère équivalent de destroy me ou l'autre alternative, destroy them.

Mais je dois reconnaitre que mon commentaire à ton billet était un tantinet provocateur mais si ca t'amène à lire mes autres billets, ca me fera un lecteur de plus. Moi je te lis déjà, et j'ai beaucoup de choses en commun avec les sujets que tu abordes.

Anonyme a dit…

C'est sûr que dans l'état où j'étais quand je l'ai lu (ton commentaire^^), disons que j'ai ravalé un peu hihi.

Mais je me suis justement dit que mon mouvement de colère n'allait pas vers la bonne personne (ou place), qu'elle était issue d'ailleurs.

Et j'ai la mauvaise manie d'attaquer quand je me sens attaquer. C'est drôle que ce soit justement de cela dont tu parles dans ton texte^^ C'est pour ça que je me dis que tu n'as pas tort. Je mets de l'eau dans mon vin lorsque j'écris à l'ex (il refuse de me parler), mais il arrive que je passe en mode "attaque" dans le choix de certains mots ou expressions - si je ne me surveille pas.

Ton texte, mais surtout le ton que tu emploies, aura permis au message de passer. Il faut beaucoup répéter pour apprendre, dit-on !

Et quant à la rage, la vraie rage, celle qui submerge... c'est une émotions qui me chavire, parce que j'en ai pas le contrôle lorsqu'elle gonfle. Je voudrais la faire taire, car je la sais mauvaise pour moi... mais ce que la tête veut, le coeur ne veut pas toujours. Elle peut facilement me gâcher plusieurs jours de ma vie.

ps, règle ce truc de profil non accessible, tu auras davantage de visites, car les lecteurs sont souvent attirés sur un blogue en cliquant sur le profil - mais si celui-ci n'est pas accessible, c'est cuit ! :)